Abraham, accoudé à son tout nouveau balcon, appréciait la vue. Un petit coin tranquille. Mais dans tous les cas, ses affaires n’allaient pas se ranger toutes seules. Il s’étira et rentra à l’intérieur tout en laissant la porte coulissante ouverte pour laisser filer la faible odeur de renfermé qui traînait là. En quelques enjambées, il fut de retour dans l’entrée où ses sacs n’avaient pas bougé d’un iota. Avisant ses rangers qu’il avait toujours aux pieds, il les ôta, eu égard du parquet qui allait avoir à subir sa présence quotidienne à partir de ce jour.
C’est pieds nus et en treillis qu’il prit les deux sacs, lâchant celui qui contentait uniquement des vêtements à côté de la porte de la chambre. L’autre était bien plus important à ses yeux et il l’emporta jusqu’à ce qu’il appellerait communément "bureau" désormais. Le posant avec douceur sur la table, il l’ouvrit pour en sortir plusieurs choses.
Tout d’abord, une sacoche qui contenait son ordinateur portable ainsi que tout le petit matériel nécessaire : souris, chargeur, casque audio, disques durs, câbles et rallonges. Il avait simplement disposé ça en vrac pour le moment. En termes de technologie, il en extirpa aussi un lecteur MP3 qui se fixait à l’épaule ainsi que les écouteurs qui allaient avec. Plus important encore, il en retira plusieurs albums photos qu’il rangea dans l’étagère présente. Quinze livres qu’il avait toujours avec lui sur la base et autant qu’il avait pris chez ses parents les rejoignirent. Il se ferait envoyer les autres plus tard. Enfin, il irait les chercher à coup de téléportation. Moins coûteux et bien plus rapide. A ce point, il déposa le sac à terre pour organiser le matériel informatique avec plus de rigueur. Une fois fait, avec tendresse, il sortit une petite boîte à musique en ébène. Il l’ouvrit, observant le petit couple de danseurs tournoyer gaiement. Il la déposa ouverte à côté avant, amoureusement, de sortir ce qui avait le plus de valeur à ses yeux : des photographies encadrées.
Ses parents, ses grands-parents paternels, une groupée de toute la famille française, ses beaux-parents, son beau-frère et ses meilleurs amis étaient de la partie. Chacun d’entre eux avait son cadre et il répartit l’ensemble sur les espaces restants de la bibliothèque. Il les accrocherait aux murs plus tard, quand il aurait de quoi le faire. Puis vint les quatre derniers : une de son mariage, une de sa femme, une de sa fille et une où elles étaient toutes les deux. Les trois premières trouvèrent aisément leur place sur le bureau, comme si elles avaient toujours dû être là. Celle qui restait, Bee la regarda longuement. L’amour qui leur portait, et qu’il leur porterait à jamais, transparait clairement dans son regard gris. Même une personne qui ne le connaissait pas ne pouvait louper cela. La gardant à la main, il l’emmena jusque dans la chambre où il la déposa précautionneusement sur la table de chevet.
Maintenant, Elena et Kira étaient avec lui.
Souriant à la photographie, il retourna chercher le sac uniquement vestimentaire ou presque. Avec une rigueur toute militaire, il sortit ses affaires pour les ranger aussitôt dans la commode présente. Quant aux chaussures, elles se glissaient à la perfection dessous. Serviettes et nécessaire de toilette finirent dans la salle de bain. S’apprêtant à pousser le sac dans un coin, il sourcilla. Du tissu non commun était présent dans le fond. L’extirpant de là, un petit mot tomba en même temps. Il se baissa pour le ramasser et y reconnut l’écriture de sa mère.
«
Parce que je sais que c’est une des rares choses que tu oublies … »
Son sourire s’agrandit un peu plus à la simple vu du mot "Maman" et du petit cœur qui y était juxtaposé. Observant le tissu noir à motifs circulaires gris et mauve, il se mit à rire tout seul en le reconnaissant : une housse de couette. Si elle était là, le reste n’était pas loin. La posant sur le lit, vide, il fouilla le fond de son propre sac pour y trouver, comme attendu, drap, drap-housse et taies d’oreillers.
«
32 ans et tu fais toujours mon sac … t’es la meilleure. »
Il déposa le petit mot près de la photo sur la table de chevet avant de faire le lit dans la foulée. Juste après, il quitta la tenue militaire qu’il laissa à plat sur le dessus du lit. Enlever ses insignes le fit grimacer. Ses autres vêtements n’ayant pas les surfaces adaptées, il ne pouvait pas les retirer pour les mettre ailleurs. Et c’était bien dommage. Par contre, ses deux plaques militaires continuaient de pendre gaiement à son cou. Ce n’est que mort qu’on le lui retirerait. A la place de son treillis, il enfila pantacourt beige et débardeur noir ainsi qu’une paire de baskets toute indiquée pour la course. Il sortit son téléphone d’une poche verte pour le mettre dans une poche beige. Il repassa dans le bureau pour prendre son lecteur et sortit de chez lui, fermant à clé avant d’elle-aussi la ranger dans une poche. Direction … l’
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